À l’occasion de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, qui a lieu ce 30 septembre, nous donnons la parole à Natshin Rousselot, Innue de Pessamit, nouvellement arrivée au CA de Mission chez nous.
Chères amies, chers amis,
Alors qu’approche la Journée nationale de vérité et de réconciliation, j’ai une pensée pour ma maman. Ma mère est une survivante des pensionnats, et ces années là-bas l’ont séparée de nous, ses enfants, sur le plan affectif. Je n’ai jamais entendu parler des pensionnats par notre mère. Ce sujet demeure un tabou et c’est en discutant avec mes grands-parents et une de ses sœurs, qui m’ont élevée, que j’ai pu mieux comprendre l’impact de ce drame sur notre famille.
Plus jeune, je vivais beaucoup d’émotions : colère, honte, frustration et culpabilité. Ma mère disait nous aimer et nous demandait constamment de l’accepter tel qu’elle était, mais j’en étais incapable. J’étais alors dans le jugement et l’absence de discernement. Lorsque la vérité a été faite sur les pensionnats, lorsque des survivants ont décidé de prendre la parole, j’ai ressenti à nouveau une vive colère et du dégoût qui m’ont éloignée de l’Église durant plusieurs années. Toutefois, je ressentais constamment un vide profond que ne comblaient pas la spiritualité traditionnelle de nos ancêtres et les nombreuses thérapies effectuées.
Au moment de ma reconversion, la figure de Marie m’a permis de me rapprocher de son fils, Jésus. J’ai pris conscience de son amour inconditionnel pour son fils, et des souffrances qu’elle a endurées en le voyant être flagellé, crucifié. Alors que je prenais conscience de cet amour immense de Marie pour son fils, je me suis dit que je devais être capable de ressentir un tel amour pour ma propre mère. Marie m’a fait comprendre que ma mère aussi est une enfant de Dieu, notre créateur, et que je dois me réconcilier avec elle et reconnaître sa dignité en tant que maman. Je suis sur ce chemin de guérison depuis et j’apprivoise toujours le fait d’être l’enfant de ma mère.
Beaucoup de personnes issues des Premiers Peuples portent de vives blessures, moi la première. Il faut accueillir la blessure, veiller à ce qu’elle ne prenne pas toute la place en nous, et se donner le temps de guérir. Et ultimement, je dirais que la seule chose qui peut nous guérir, c’est l’Amour, l’Amour divin. Car Dieu, le créateur, est Amour.
Natshin Rousselot,
en collaboration avec Mission chez nous
Ce texte est paru initialement dans le Prions en Église mensuel de ce mois de septembre 2024 pour souligner la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.